El Chimborazo!
Une route en lancets qui nous mène tout droit dans un paysage désertique et nous voilà au pied du mastodonte. Tel un sage qui repose en paix, il dégage à la fois une impression de force et de tranquillité. Il en a vu d´autres ce Chimborazo... Il a d´ailleurs la particularité d´être le point le plus proche du soleil sur la Terre. Un peu plus de 2km plus près des étoiles que sa majesté l´Everest en partant du centre du globe.
Avant d´être soi-même sur le meilleur spot de bronzage, il s´agit de gravir 1 510m... dénivelé qui sépare le premier refuge à 4 800m de la cumbre Whymper à 6 310m! Gravir un 6 000m une idée qui ma foi me plait! J´y vais crescendo mais seguro, après le volcan San Cristobal (1 700m) au Nicaragua, les 3 800m du Chirripo au Costa Rica, les 4 700m du Pichincha au dessus de Quito et les 5 200m de l´Iliniza Sur...
Je ne saurai que trop être prudent quant à la réussite de cette ascension, entre les paramètres physiques et les aléas climatiques bien des murs peuvent se dresser sur notre route. Fausto et moi nous connaissons déjà pour avoir gravi l´Iliniza Sur ensemble. J´ai une grande confiance dans sa capacité à me mener à la cumbre mais ca va pas se faire tout seul! ;)! Un vrai challenge! A quelques heures du départ la pression monte, le froid est toujours aussi présent dans le refuge et on se réchauffe avec des litres de thé. Le temps est brumeux depuis le milieu de journée mais le vent ne souffle pas. Vamos!
Après s´être échauffés en rejoignant le 2ème refuge dont le nom "Whymper" est dédié au premier homme qui a atteint le sommet, nous prenons quelques forces avec les traditionnelles pâtes aux thons que je maîtrise à merveille tant la complexité de la réalisation est élevée! Fausto d´ailleurs me fait plus ou mois faux bond et termine avec le poulet du voisin. Erreur avérée lorsque nous nous réveillons vers 23h pour les préparatifs finaux. Fausto fait grise mine et son estomac n´a apparemment pas apprécié la fin du dîner! De mon côté, je n´ai pas vraiment senti les 2h de sommeil mais qu´importe la forme est là. Les uns après les autres les groupes quittent le refuge et nous prenons notre temps pour que Fausto trouve quelques forces. Le top-départ est donné et je comprends assez rapidement que Fausto bien que sûrement diminué est en pleine forme à mes yeux!
Le temps est dégagé, une chape d´étoiles surplombe nos têtes et pendant la 1ère demi-heure le vent nous laisse en paix. Les différents groupes progressent ensemble et nous avons devant nous une belle guirlande éclairée qui se dandine telle un serpent. Après une petite heure d´effort pendant laquelle je sens que relativement le manque d´air, nous chaussons les crampons et relions la corde entre nos harnets. Le pourcentage de la pente augmente mais jusqu´au Castillo nous fonctionnons tels des mobilettes... A partir de l´arête, le vent se met à souffler par rafale et mon seul repère est la lampe de Fausto puisque nous avancons dans l´obscurité, plus de lumière devant nous ni derrière. Le chemin n´est pas "très" dur à suivre c´est tout droit jusqu´au sommet.
J´essaie de trouver un rythme pour ne pas m´essoufler trop rapidement. L´air se fait de plus en plus rare, j'ai l´impression de respirer comme un boeuf par moment et les pauses se font plus nombreuses. Jusqu'à 5 900m, mes jambes suivent la cadence sans trop rechigner et le moral est plutôt bon. Dans un effort long comme celui-là qui se déroule dans un noir quasi-complet, point le loisir de se divertir l´esprit. On pense donc à beaucoup de chose mais surtout au prochain mètre à monter. Le froid se faisant sentir, le capital d'énergie positive s'effrite peu à peu. Les doigts qui tiennent le piolet relativement inactifs se congèlent sous l'emprise du vent et ma concentration sur l'effort s'évapore et se détourne pour tenter d'atteindre le sommet avec mes dix doigts. Sommet qui me paraît bien loin depuis quelques minutes. "Fausto quanto tiempo necessita mas????" "Una hora.." "P...., fais chier!".
Heureusement, les minutes passant je m´aperçois que la montagne commence à faire le dos rond et que les étoiles se font plus nombreuses devant ma vue. Je comprends qu´on approche et ce n´est pas sans un certain soulagement qu´on atteint le sommet Ventimilla (6 267m) tant je commence à être congelé. Il faut dire que je n´ai pas vraiment d´habit adapté à ces altitudes et que les - 10·C transformés en -15·C avec le vent se privent pas pour me refroidir!
En haut, nous nous congratulons avec Fausto dans une crevasse. Au loin, j´apercois le sommet Whymper (6 310m).. celui-là je ne ferai que le regarder car ma seule préoccupation du moment est de redescendre pour gagner des degrés. Je sais par ailleurs que les quelques forces qu´il me reste ne seront pas de trop pour rester debout dans la descente.
Dès les premiers mètres je comprends rapidement que le retour va être pénible et ça commence par une bonne chute... Merci Fausto! Petit à petit la luminosité perce les nuages et le paysage prend des couleurs. Ça donne un peu d'allant au moral car le retour au refuge me semble interminable. A court de force, je m'arrête toutes les minutes et lorsque nous croisons 2 polonaises et un américain en plein effort ascendant je leur souhaite bien du courage! Ils ont l'air déjà exténués et le sommet est encore loin! Après 7H25 nous voilà de retour au refuge heureux d´avoir réussi. Prochain objectif le sommet Whymper quand je serai de retour sur la ligne de l´Equateur!
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